lundi 28 février 2022

Les statues ralenties.

Les chiens courent après
les ombres brûlantes des
jardins. 
Des géants se sont face, 
la tête perdue dans l' obscurité.

Les hordes d' enfants creusent,
non loin de la frontière, 
les hordes d' enfants hurlent
autour des villes assiégées, 
les hordes d' enfants soufflent
des avalanches sur les toits.
La terre tremble - du sang frais
épaissit la gorge des rossignols.

Hier, le soleil a plongé
dans nos yeux immobiles
des mains blanches comme
des épaulards.
Ce qu' il en a retiré, il l' a
dispersé entre les anges 
aux cuirasses noires qui
montent la garde et les ogres
qui attendent leur pitance 
en trépignant.
Aujourd' hui, c' est la douleur
qui frottera ses paumes 
contre le vent - pour en chasser
les poissons éventrés. 
 
Comme des statues ralenties,
nous admirons les machines
et le temps qui brûle ses orphéons
d' or, en silence.

jeudi 10 février 2022

Retrouver Lorca - Une suite.

Rien. Il n'y a rien de 
sérieux dans la poésie.
En tout cas, pas plus
que dans le rock n' roll.
Retrouver Lorca.
Et dans les sciences
économiques, qu' est-ce
qu' il y a de sérieux dans
les sciences économiques ?
Rien, évidemment.
Retrouver Lorca,
tout le reste n' a
aucune importance.
Il me faudrait,
pour m' expliquer,
tenter d' expliquer
toute ma vie - et
il est bien tard pour cela.
La poésie tient, dans
sa main, tout
le temps du monde.
Moi je n' ai que
mes mains à
proposer à la poésie,
des mains sales,
pleines de rues et de
visages oublies,
sales comme
des peignes, comme
de la couenne.
Lorca lui savait
comment la rose
du temps brûle
au fanal des côtes
silencieuses et
taillade de ses ongles
cancéreux les bourgeons
suaves de la lèpre.
Et, après le temps,
de quelle manière
la poésie s' échoue
en murmurant
contre le visage
des vierges
gitanes.
Retrouver Lorca,
pour ne pas perdre
le temps des mains,
ni celui des roses
heurtées avec indolence
aux lèvres
des morts.

vendredi 4 février 2022

Mes ombres de Janvier.

A mes belles ombres de Janvier,
longtemps je vous ai cru défaites, 
je vous croyais vaincues. 
Mes belles ombres blessées, 
vaincues comme des éléphants morts,
défaites comme les fleurs du sort.

Je me trompais, ombres 
de mes ombres, vous avez dansé
comme des colombes, vous 
avez aimé comme des lampions, 
ri comme des musiques et bu 
comme des amants, vous
n' étiez pas des ombres.

C' est moi qui voulais vous 
transformer en ombres.
Peut-être avais-je besoin de tristesse,
peut-être avais-je besoin de désespérance,
peut-être avais-je besoin d' ombre
oú me cacher.